Saül, l’oratorio de Haendel en version grand spectacle biblique au Châtelet

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Saül, l’oratorio de Haendel en version grand spectacle biblique au Châtelet

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Saül, l’oratorio de Haendel en version grand spectacle biblique au Châtelet
Saül, l’oratorio de Haendel en version grand spectacle biblique au Châtelet
- Bill Coop

Présenté pour la première fois en France, l’oratorio de Haendel “Saül”, mis en scène par Barrie Kosky, est à l’affiche du théâtre du Châtelet. Karina Gauvin et Christopher Purves se partagent la scène de ce drame biblique.

C’est un événement rare que nous propose le théâtre du Châtelet. D’une part, parce qu’on a moins l’habitude de voir Saül à l’affiche que Le Messie, oratorio mieux connu de Haendel, mais aussi parce que l’oeuvre présentée du 21 au 31 janvier est mise en scène, dans une version plus attractive que l’habituelle version de concert. L’exercice a été confié par le festival de Glyndebourne à l’Australien Barrie Kosky, qui n'a pas rendu la tâche aisée aux chanteurs. Ce dernier a installé sur scène un immense plan incliné recouvert de petits morceaux de styromousse noirs, qui donnent l’impression que chanteurs et danseurs marchent dans la terre. 

Marcher dans la (fausse) terre, sauter, courir… dans cette mise en scène les artistes donnent tout ce qu’ils ont. A commencer par Christopher Purves, qui campe un Saül brillant. Le baryton va jusqu’à exécuter un salto arrière (heureusement accompagné par les danseurs qui l'entourent) : « c’est physiquement épuisant commente-t-il mais c’est vraiment excitant et libérateur pour moi, en tant qu’interprète ». Même son de cloche pour Karina Gauvin, qui joue sur sa fille Merab : «  les contraintes physiques sont importantes (...) on ne s’en rend pas forcément compte depuis la salle, mais la scène est extrêmement pentue ». Et les deux artistes soulignent que cet engagement physique donne corps à leur personnage. 

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C’est peut-être la première difficulté de cette production : sur scène, Christopher Purves, Karina Gauvin et les autres artistes interprètent Saül, sa fille Merab, son fils Jonathan, le futur roi David, ou encore le prophète Samuel. Des personnages de l’ancien testament que les artistes lyriques ont peu l’occasion de jouer sur scène, et qui ont une aura différente de celle des personnages d’opéra dont ils ont l’habitude : « Bon nombre d'opéras de Haendel manquent de ce type de grands thèmes dont la Bible regorge constate Christopher Purves_. Saül lui-même, David, si vous pensez à ces deux personnages, ils sont énormes. Mettre en scène cet oratorio, ce qui n’était pas possible, ce qu’on ne pouvait pas faire au XVIIIe siècle, le faire aujourd’hui, c'est très excitant_ ».

La scène inclinée et les bougies dans la mise en scène de Saül par Barrie Kosky
La scène inclinée et les bougies dans la mise en scène de Saül par Barrie Kosky
- Bill Cooper

Il faut dire qu’il y a dans ce drame sacré tous les ingrédients d’un bon opéra : la jalousie de Saül pour le jeune David qui pousse le vieux roi à demander à son fils Jonathan de l’assassiner, puis à essayer de le tuer lui-même, sa folie qui le mène à condamner son propre fils, une fille qui repousse David, un prophète qui lui annonce sa mort… « c’est très très théâtral » souligne Karina Gauvin. 

La soprano canadienne a l'habitude d’aller et venir entre ces deux univers, musique sacrée et opéra, et a enregistré bon nombre d’opéras de Haendel. Pour elle, la spécificité de cet oratorio, renforcée par la mise en scène, est qu’il est composé d’airs « à grand déploiement. Ce ne sont pas des airs da capo ornementés, c’est beaucoup plus dépouillé, beaucoup plus déclamatoire. C’est là qu’on se rend compte que cela requiert des voix corsées, parce que ce ne sont pas des personnages fictifs, cela requiert des personnages bien trempés, des caractères bien juteux ». 

Visuellement très réussie, la reprise française de cette production de Saül vient enrichir le catalogue des drames sacrés mis en scène au théâtre du Châtelet. Une particularité initiée il y a plus de dix ans, et qui a vu Bob Wilson mettre en scène la Passion selon Saint Jean (2006), Oleg Kulik les Vêpres de Monteverdi en 2009, puis un Messie plus hasardeux en 2011.  

Saül de Haendel est à l'affiche du théâtre du Châtelet du 21 au 31 janvier 2020. Mise en scène de Barrie Kosky, avec Christopher Purves, Karina Gauvin, Anna Devin, Benjamin Hulett, Christopher Ainslie, Stuart Jackson, John Graham-Hall, et l'ensemble Les Talens Lyriques dirigé  par Laurence Cummings.

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