Visites tactiles, lunettes "connectées" : les Opéras améliorent l'accueil des spectateurs malvoyants

Michel, malvoyant, visite les décors avant une représentation de "Carmen : cour d'assises", au Théâtre Auditorium de Poitiers - Cédric Boissinot
Michel, malvoyant, visite les décors avant une représentation de "Carmen : cour d'assises", au Théâtre Auditorium de Poitiers - Cédric Boissinot
Michel, malvoyant, visite les décors avant une représentation de "Carmen : cour d'assises", au Théâtre Auditorium de Poitiers - Cédric Boissinot
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Par souci d'ouverture, beaucoup de salles planchent sur des solutions. L'audiodescription, désormais bien connue, l'usage de nouvelles technologies, les visites tactiles des décors... Reportage.

Comment rendre l'opéra plus accessible au public malvoyant ? En France, près de 1,7 million de personnes sont atteintes d'un trouble de la vision, selon les estimations de la Fédération des Aveugles de France. Par souci de démocratisation et d'ouverture, beaucoup de salles planchent sur des solutions. L'audiodescription des spectacles, désormais bien connue, l'usage de nouvelles technologies... Les visites tactiles des décors, aussi, qui se développent ces dernières années.

"Je visualise un peu le mobilier, sa conception"

Avec précaution, Michel, malvoyant, monte quelques marches sur le plateau du Théâtre Auditorium de Poitiers. Grâce à une visite tactile, le retraité découvre, par la description et le toucher, les décors, les costumes de Carmen, cour d'assises. De quoi mieux appréhender l'opéra, auquel il assistera le lendemain. "C'est ce qui me permet aussi d'apprécier les différents volumes. Sans mauvais jeu de mot, je visualise un petit peu le mobilier, sa conception et son déplacement", raconte-t-il : "J'ai déjà eu l'occasion de faire plusieurs visites tactiles, c'est la quatrième fois. Une bonne initiative car ce sont des décors différents, c'est à chaque fois une nouvelle expérience."

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"Il est important que je sois là, car ça lui donne de la confiance", glisse Simone, la compagne de Michel, qui l'accompagne. "À différentes reprises, nous avons fait des visites tactiles où l'on pouvait réellement toucher les tissus des acteurs, avoir des explications sur l'éclairage." Sont-ils tous les deux amateurs d'art ? "Lui davantage ! Il me l'a un peu communiqué..."

Michel dans les coulisses avec Alexandra Lacroix, la metteuse en scène
Michel dans les coulisses avec Alexandra Lacroix, la metteuse en scène
- Cédric Boissinot

Audiodescription et nouvelles technologies

"Il est intéressant d'aller sur le plateau pour découvrir les matières, les volumes, l'espace", étaye Lola Solignac, médiatrice culturelle au TAP, qui coordonne ces visites tactiles, mais pas que. L'établissement essaie de varier les propositions à destination des personnes malvoyantes : "Nous faisons aussi des ateliers de découverte du TAP par le biais de maquettes tactiles, des visites sensorielles... Nous essayons de multiplier les pratiques, même si cela reste toujours tout à fait imparfait." Imparfaits car "beaucoup de spectacles leur restent inaccessibles", souligne-t-elle. D'où l'importance aussi des représentations dites "en audiodescription", qui se développent en France depuis plusieurs années : le spectateur, équipé d'un casque, peut suivre la représentation grâce à une voix off, qui décrit les déplacements, les costumes.

Mais certains vont même plus loin comme l'Opéra de Lille, qui mise sur la réalité augmentée. "Cette saison, nous développons des lunettes connectées", explique Delphine Feillée, référente accessibilité : "Ces lunettes vont donner un accès personnalisé aux surtitres, qui s'afficheront directement sur les lunettes. Nous allons pouvoir gérer la taille, plus ou moins grande, gérer la couleur avec trois choix, blanc, orange ou jaune, et également choisir la place que vont avoir les surtitres dans le champ de vision." Aussi utile pour les spectateurs malentendants, qui peuvent suivre l'opéra en langue des signes sur les lunettes. Prochaines représentations "connectées" à Lille prévues en octobre, pour Don Giovanni.

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