Adagio, allegro... Ces tempi qui ne sont plus les bienvenus en Tchétchénie

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Adagio, allegro... Ces tempi qui ne sont plus les bienvenus en Tchétchénie

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Ramzan Kadyrov, le chef de la République tchétchène
Ramzan Kadyrov, le chef de la République tchétchène
© AFP - Sergei SAVOSTYANOV

Le ministre de la Culture a annoncé l'interdiction des musiques trop rapides ou trop lentes, pour coller à "la mentalité et au rythme musical" de la Tchétchénie. De nombreux morceaux classiques seraient concernés. Liste non-exhaustive.

Pour pouvoir être jouée en Tchétchénie, une musique devra désormais respecter la cadence imposée par le régime. Précisément, ne seront tolérés que les morceaux dont le tempo est compris entre 80 à 116 battements par minute (bpm), rapporte l’agence de presse russe Tass. Objectif : inculquer “au peuple et à nos enfants l’avenir de l’héritage culturel du peuple tchétchène”, avec de pièces correspondant à “la mentalité et au rythme musical tchétchènes”, justifie le ministre de la Culture Musa Dadayev,  interrogé par la chaîne CNN. Les artistes biélorusses ont jusqu’au 1er juin pour réécrire les musiques qui ne répondraient pas aux nouveaux critères du régime.

Sont visés, à travers cette mesure, de nombreux genres de musiques occidentaux, comme la techno, la pop ou la house. Mais le classique est aussi concerné. Concrètement, les seuls morceaux qui trouvent grâce aux yeux du gouvernement tchétchène sont les morceaux écrits au tempo Andante, entre 76 et 108 battements par minute, et Moderato, entre 108 et 120 bpm. Exit, donc, les tempi Adagio (66-76 bpm), les Allegro (120-160 bpm), sans parler des Presto, bien trop rapides (jusqu'à 200 battements par minute). À noter une tolérance, toute relative, pour Allegretto (entre 100 et 128 bpm).

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Exit le Boléro, ou l'Adagio d'Albinoni

Appliquer ce principe à la lettre donnerait des résultats pour le moins farfelus. Il faudrait ainsi ne jouer, à titre d'exemple, que le deuxième mouvement du  Concerto n°2 pour piano de Chostakovitch, Andante, le premier et le deuxième étant Allegro. La  Symphonie n°2 en do majeur de Schumann serait quant à elle bannie dans son entièreté (surtout son deuxième et quatrième mouvement, bien trop véloces). L'Adagio d'Albinoni ? Trop lent, avec ses 72 battements par minute. Le Boléro de Ravel ? Recalé, mais de peu (76 bpm).

Et puis il y a les extrêmes.  Ce guitariste, qui joue le Vol du Bourdon de Rimski-Korsakov à une vitesse ahurissante, jusqu'à 300 battements par minute – un record – ne serait sans doute pas le bienvenu en Tchétchénie. À l'inverse,  cette pièce pour orgue de John Cage, Organ2.ASLSP ("as slow as possible", soit le plus lentement possible) et interprétée en ce moment dans une église allemande, dont la fin est prévue en 2640, susciterait sans doute l'impatience du gouvernement tchétchène. Comble : l'hymne national de la fédération de Russie, composé par Aleksandr Aleksandrov, ne rentre pas dans les critères, plafonnant à 71 battements par minute.

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