Erin Morley, la voix en rose

La soprano colorature américaine Erin Morley - Chris Gonz
La soprano colorature américaine Erin Morley - Chris Gonz
La soprano colorature américaine Erin Morley - Chris Gonz
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La soprano colorature américaine sort son premier album de récital, Rose in Bloom, et sera sur la scène de la Philharmonie de Paris pour Carmina Burana cette semaine avec le Chœur et l’Orchestre de Paris, dirigés par Andrés Orozco-Estrada.

Avec
  • Erin Morley Soprano colorature américaine

Elle est l'une des stars du Metropolitan Opera de New York où elle s'est produite plus de cent fois - notamment pour interpréter Sophie dans Le Chevalier à la rose de Strauss, Pamina dans La Flûte enchantée de Mozart ou encore le rôle-titre de l'opéra Eurydice de Matthew Aucoin dirigé par Yannick Nézet-Séguin, création qui a été un véritable triomphe en 2021. Pourtant, Erin Morley est encore peu connue en France où elle a fait ses débuts à l'Opéra de Paris en 2014 dans L'Enlèvement au sérail de Mozart. Les choses sont en passe de changer : la chanteuse, récemment nommée Chevalière de l'Ordre des Arts et des Lettres en France par le ministère de la Culture, sera cette semaine sur la scène de la Philharmonie de Paris pour chanter Carmina Burana de Carl Orff avec le Chœur et l'Orchestre de Paris. Mais elle sort également son premier album de récital ce vendredi 19 avril : "Rose in Bloom". Des chansons célébrant les fleurs, les oiseaux, la nature et qui traverse les langues et les styles de compositeurs des XIX et XXe siècles comme Saint-Saëns, Berg, Milhaud, Sullivan, Rachmaninov ou Rimsky-Korsakov.

"Huit Chansons de Fleurs" de Ricky Ian Gordon

L'album arrive comme une fleur, au cœur du printemps, et Erin Morley aime le qualifier de "rite de passage" : "C'est une promenade, comme si les gens se promenaient avec nous dans un jardin". L'origine de "Rose in Bloom" est un cycle, Huit Chansons de Fleurs de Ricky Ian Gordon, racontant ce que représente la nature, célébrant la fleur comme symbole de résurrection et de mort. Des poèmes américains signés Wordsworth, Emily Dickinson, Telmo dos Santos ou Dorothy Parker, et aussi d'un couple formé par poètes Jane Kenyon et Donald Hall. "C'est assez rare de rencontrer des poètes mariés. L'un des poèmes de Jane Kenyon est un texte qu'elle a écrit alors qu'elle était en train de mourir d'une leucémie. Il parle des fleurs, des pensées particulièrement. Le deuxième poème est celui que son mari a écrit après la mort de sa femme. Il s'appelle « Son jardin » et évoque la manière dont il a pu apprécier leur beau jardin lorsque Jane Kenyon était en vie, et ce même jardin qu'il a vu se détruire après la mort de sa femme. C'est très triste mais c'est le cœur du cycle et on a bâti notre programme autour de cela".

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La découverte de chansons restées dans l'ombre

Le disque évoque la symbolique de la nature dans ce qu'elle peut avoir de mélancolique, mais il n'en est pas moins solaire, plein d'émerveillement, de virtuosité et d'humour. Car les chansons dédiées à la nature et aux oiseaux ne manquent pas dans le répertoire des coloratures, et Erin Morley a pris plaisir à découvrir des pépites peu chantées de compositeurs pourtant très connus. C'est le cas de La Libellule de Saint-Saëns, l'une de ses découvertes favorites. "Je n'avais jamais entendu parler de ce morceau jusqu'à ce que Gerald Martin Moore, mon pianiste, me la propose. Il a été écrit pour la célèbre soprano américaine Sibyl Sanderson, aimée de nombreux compositeurs français et pour laquelle beaucoup de rôles d'opéra ont été écrits. La Libellule a été composée pour elle, mais je pense surtout que la chanson parle d'elle : l'oiseau passe d'une fleur à l'autre, Sibyl Sanderson était une dévoreuse d'hommes et passait d'un homme à l'autre : c'est la manière dont elle a vécu sa vie".

Des comédies musicales américaines à l'opéra

Si cet album solo arrive relativement tard dans la carrière de la chanteuse, c'est peut-être parce que son parcours a été marqué jusqu'ici par une multitude de grands rôles d'opéra. Des performances mémorables allant des héroïnes tragiques aux interprétations les plus comiques comme son Olympia dans Les Contes d’Hoffmann d’Offenbach en 2015 par exemple. Une capacité étonnante à incarner, qui lui vient sans doute de son amour pour les comédies musicales américaines, dès l'enfance. Née dans une famille de musiciens dans l'Utah, à Salt Lake City, Erin Morley grandit en faisant de la musique et en jouant à l'église. Elle apprend d'abord le piano et le violon avec sa mère violoniste, puis se met à chanter à 16 ans grâce à son père, lui-même chanteur mais aussi spécialiste de la voix à travers son métier d'otorhinolaryngologiste. "Nous sommes cinq enfants dans la famille et tout le monde fait quelque chose avec la musique". Voulant d'abord être pianiste, elle découvre qu'elle a une voix en entrant à l'Eastman School of Music à New York. "Je n'avais jamais vu un seul opéra avant d'entrer à l'Université et je n'avais aucune idée de ce que j'allais devoir faire. Mais je savais que j'avais envie de chanter". S'ensuivent la Juilliard School et le prestigieux Lindemann Young Artist Development Program du MET. Quinze ans plus tard, Erin Morley chante et enchante un public qui applaudit sa voix cristalline, fine et forte à la fois, sa capacité à emporter et à émouvoir.

Actualités:
Rose in Bloom– Orchid Classics, disponible le 19 avril 2024 avec le pianiste Gerald Martin Moore
Carmina Burana à la Philharmonie de Paris les 17 et 18 avril avec le Chœur et l’Orchestre de Paris, dir. Andrés Orozco-Estrada
Händel, Alcina – Pentatone, février 2024 avec Les Musiciens du Louvre, dir. Marc Minkowski

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