Concerto pour violon n°2 de Felix Mendelssohn dans les oreilles de la Tribune

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Les commentaires des gagnants seront lus à l'antenne par Jérémie Rousseau la semaine suivante.

Le compte-rendu de Jérémie Rousseau

Qu'y a t-il derrière cette pureté de ligne, si noble et élégante ? Un jeu lisse, une absence totale de risques. Il est cruellement reproché au Mendelssohn de Viktoria Mullova ses idées superficielles.

Mécanique, l’introduction laisse la place à un violon rayonnant, celui d’un soliste qui s’en donne à cœur joie, fougueux, libre de faire comme il l’entend, quitte à montrer les muscles et engager le combat avec l’orchestre. Ainsi Nathan Milstein sortit.

S’appuyant sur un orchestre un rien épais, Hilary Hahn insuffle un lyrisme débordant à Mendelssohn. On relève une pointe d’impatience dans ce jeu volontariste qui, dans l’Andante, mélange agréablement assurance et fragilité. Mais est-ce assez ?

La version qui dérange, la voilà. Alina Ibragimova, très à son aise techniquement, livre un Mendelssohn chambriste et historiquement informé, bousculant les habitudes par des tons âcres et un son peu confortable, mais refusant aussi bien des émotions – c’est la limite de l’expérience.

Le théâtre, la déclamation du grand acteur, le chant radieux, dans son panache et son éloquence, d’un virtuose touché par la grâce mais très respectueux du texte. Face à un orchestre parfois en retrait, Isaac Stern s’adonne à un jeu de funambule, désopilant de naïveté, simple et nu dans sa vérité, avec des teintes sombres et tragiques, dont un Andante gagné par la nostalgie, entre chien et loup. Si ce violon est d’un autre âge, on est émerveillé par tout ce qu’il nous murmure à l’oreille.

Maxim Vengerov réunit toutes les qualités : effervescence, finesse d’archet, chant apollinien. Son approche aérienne joue sur la fluidité et la respiration (quel mouvement lent !), dégage une douceur, une tendresse et, tout simplement, une capacité à jubiler. Cela avec le soutien ample et naturel de Kurt Masur et d’un Gewandhaus de Leipzig aux teintes soyeuses et mordorées. Un régal d’équilibre et de délicatesse. Du grand art.

Palmarès

N°1 : Version C
Maxim Vengerov, Orchestre du Gewandhaus de Leipzig, dir. Kurt Masur
Teldec (1993)

N°2 : Version B
Isaac Stern, Philadelphia Orchestra, dir. Eugene Ormandy
Sony (1958)

N°3 : Version D
Alina Ibragimova, Orchestra of the Age of Enlightenment, dir. Vladimir Jurowski
Hyperion (2011)

N°4 : Version A
Hilary Hahn, Orchestre philharmonique d’Oslo, dir. Hugh Wolff
Sony (2002)

N°5 : Version E
Nathan Milstein, Philharmonia Orchestra, dir. Leon Barzin
EMI (1959)

N°6 : Version F
Viktoria Mullova, Academy of St Martin in the Fields, dir. Neville Marriner
Philips (1990)

Prochainement dans la Tribune des critiques de disques :

28 avril 2024 : Chants d’Auvergne de Canteloube
5 mai 2024 : Concerto pour piano de Grieg
12 mai 2024 : Quatuor à cordes n°12 de Beethoven
19 mai 2024 : La Stravaganza de Vivaldi
26 mai 2024 : Nocturnes de Fauré
2 juin 2024 : Madame Butterfly de Puccini